Les conseils d’écriture de H.P. Lovecraft
Les conseils d’écriture de H.P. Lovecraft

Les conseils d’écriture de H.P. Lovecraft

Extrait des “Notes sur l’écriture de la fiction surnaturelle”, dans “L’appel de Cthulhu”, de Howard Phillips Lovecraft, Edition poche couverture rigide, chez Points, traduite par François Bon, page 75-77. (978-2-7578-8649-6)

“Le processus de l’écriture est alors aussi varié que le choix du thème et de la circonstance initiale ; mais si on analyse l’histoire de chacune de mes fictions, on pourrait déduire les règles suivantes de leur procédure habituelle :

1, – Préparer un synopsis ou un scénario des événements dans l’ordre absolu de leur occurrence – et non pas l’ordre de la narration. Les décrire avec assez d’ampleur pour couvrir tous les points vitaux et justifier de tous les incidents prévus. Dès cette esquisse temporaire, les détails, commentaires et conséquences prévus sont les bienvenus.

2, – Préparer un second synopsis un scénario des événements, celui-ci dans l’ordre de la narration (non de leur apparition réelle), avec le maximum d’ampleur et de détail, et des notes comme les changements de perspective, d’émotions, de climats. Modifier le synopsis original pour examiner si ces changements augmentent la force dramatique ou l’efficacité générale de l’histoire. Interpoler ou effacer les éléments selon vos souhaits – ne vous sentez jamais lié par la conception originale, même si le résultat final, c’est une histoire entièrement différente que la première envisagée. Autoriser les additions et les altérations partout où c’est suggéré par un élément quelconque du développement.

3, – Écrire l’histoire – rapidement, à la volée, sans être trop critique-, en suivant le second synopsis, celui qui est dans l’ordre de la narration. changer les événements et les sujets partout où le processus de développement semble suggérer un tel changement, ne vous sentez jamais lié par aucune idée initiale. Si le développement révèle soudain de nouvelles opportunités de développement dramatique, ou de nouvelles colorations de l’histoire, les ajouter partout où cela vous semble à l’avantage – retour aux deuxième plan et réaménagement pour concilier avec les éléments originaux. Insérer ou effacer de pleines sections si cela semble nécessaire ou désirable, essayer de différents débuts et fins jusqu’à ce que le meilleur arrangement soit trouvé. S’assurer que toutes les références associées à l’histoire sont dûment en accord avec le dessin final. Enlever tout le superflu possible – mots, phrases, paragraphes ou épisodes entiers – tout en observant les précautions usuelles concernant la compatibilité des références.

4, – Réviser le texte entier, faire attention au vocabulaire, à la syntaxe, au rythme de la prose, à la proportion des parties, aux beautés de ton, la grâce et la conviction des transitions (scène à scène, d’une action lente et détaillée à une action rapidement esquissée dans le temps, puis le contraire, etc., etc.), l’efficacité du début, de la fin, des climats, de la tension dramatique, et l’intérêt, la crédibilité et l’atmosphère, et tous autres éléments.

5, – Dactylographier proprement la mise au net – sans hésiter à ajouter de nouvelles touches de révision finale là où elles semblent nécessaires.

La première de ces étapes est souvent purement et simplement mentale – un ensemble de circonstances et d’événements que j’ai assemblés dans ma tête et jamais mis par écrit avant que je sois capable de préparer le synopsis détaillé de ces événements dans l’ordre de la narration. De même, je commence parfois la rédaction sans même savoir comment je développerai l’idée – ce début étant en lui-même le problème à expliciter et exploiter.”

H.P. Lovecraft

Note: Illustration d’en-tête réalisée par Disse86